Coup d’Etat en Afrique de l’Ouest: Menace ou opportunité pour l’enracinement de la démocratie?

© Quentin VANHOOF / RTBF

Les récents coup d’Etats en Afrique de l’Ouest et particulièrement dans le Sahel ont suscité plusieurs discussions autour de la démocratie qui pour la majorité mettent en relief le fait que la démocratie soit en danger dans cet espace géographique. Toutefois il s’avère important d’explorer d’autres angles d’observation.

1- Comprendre la démocratie

la démocratie fait objet de plusieurs approches de définition depuis son existence, une observation effective permet tout au moins de dégager des principes commun à la majorité de ces définitions pour ne pas dire toutes. Ces principes peuvent donc servir de prisme pour identifier de façon scientifique une démocratie. il s’agit :

La participation effective des citoyens;

les citoyens sont sensés être aussi bien en amont, en aval, qu’au cœur d’un régime démocratique. Autrement dit, le taux de participation des citoyens au processus de désignation des leaders et représentants doit toujours être au delà des 50% de la population, de préférence entre 75% et 100%. Les politiques publiques doivent travailler à ce que la répartition des richesses soit effectuée de façon à ce que les conditions de vie des citoyens soient en nette amélioration au quotidien et que les disparités sociales soient moins perceptibles.

La garantie des libertés fondamentales;

l’existence d’un régime démocratique en soi est sensé être l’incarnation du respects des libertés fondamentales tout en tenant compte des paramètres culturels de chaque société. Cela renvoie à la liberté d’expression, de circulation, de culte, d’opinion pour ce qui est des libertés individuelles. Pour ce qui est de libertés collectives on peut citer les libertés de réunion, d’association, de manifester, et de presse. La liste n’est pas exhaustive.

Le respect de la règle de droit;

Le régime démocratique par excellence fait place à la règle de droit dans toute sa forme, c’est a dire de la conception des textes à leur mise en œuvre le système veille à l’implication du peuple, la prise en compte de l’intérêt général tout maintenant l’égalité de tous devant la Loi.

La reddition des comptes;

La culture de rendre comptes s’impose aux acteurs politiques et à toute personne qui occupe un poste de responsabilité. Dans cette dynamique, l’accessibilité à l’information relative à la gestion de la chose publique, surtout les finances.

Des élections libres et juste;

De pareilles élections impliquent une autonomie financière, à défaut une capacité d’autofinancement assez importante, des conditions logistiques et sécuritaires qui permettent de couvrir l’ensemble du territoire du pays organisant les élections, un taux de participation assez élevé aussi bien au niveau de la liste électorale que de la participation effective aux votes.

CONSTATS: La démocratie peinait déjà à exister avant l’avènement des coup d’Etats récents

Pour la totalité des pays concernés on semble être loin du respect scrupuleux des principes de la démocratie. On constate que à peine un tiers des citoyens s’inscrivent sur les listes électorales et c’est en général la majorité de ceux inscrits qui décident des leaders et représentants. Ceci remet en cause le principe de la participation citoyenne. Pour ce qui est du respect de la règle de droit et des libertés fondamentaux, il suffit de lire de façon transversale certains rapports officiels et ceux des Organisations Non Gouvernementales pour comprendre le respect de ces principes est assez loin du compte pour qu’on puisse parler de démocratie avec conviction. La reddition des comptes n’est forcément envisagée comme une culture et pour les Etats du sahel les élections précédant les récents coup d’Etats n’ont pas vraiment pu se dérouler sur l’ensemble du territoire effectivement pour des raisons sécuritaires et bien d’autres facteurs de nature à entacher d’une façon ou d’une autre la crédibilité de ces élections, remettant en cause la légitimité et la légalité de certains dirigeants. Sans pour autant occulter ce que certains analystes qualifient de mauvaise gouvernance de certains leaders. En résumé, parler de la démocratie dans ces Etats c’est scientifiquement mettre de côté tous les principes évoqués ci-dessus. En d’autres termes, il est évident que le processus démocratique peinait à exister effectivement dans ces pays.

2- Détermination subjective des menaces à la démocratie

Plusieurs comportements sociaux des acteurs politiques qui naturellement constituent des menaces à la démocratie et de ce fait devraient attirer l’attention des institutions et acteurs de cette démocratie sont souvent ignorés s’ils ne sont pas qualifiés de faits mineurs n’étant pas de nature à entacher la qualité des processus démocratiques. Il s’agit parfois de corruptions, violation des libertés fondamentales, instrumentalisation de l’appareil judiciaire à des fins politiques, élections ne respectant pas les conditions nécessaires pour être crédibles, et bien d’autres écarts.

3- Dissociation aigue entre les perceptions institutionnelles de la démocratie et celles des peuples

Les institutions estiment que tant que les textes sont modifiés dans les règles de l’art pour servir les intérêts politiques d’un groupe et que ces textes sont respectés la démocratie est en marche. Tant que les élections sont organisées et il y a un vainqueur, peu importe que le taux de participation soit faible ou pas ce n’est pas un problème. Or, ce qui compte pour le peuple c’est son bien être, la nécessité de voir leurs conditions de vie s’améliorer. C’est donc une division entre ceux qui accordent de la valeur à la démocratie dans sa forme et ceux qui conçoivent mieux la démocratie par rapport à son fond et sa finalité.

4- Approche de solution

Certes les coup d’Etats ne sont pas à promouvoir, mais ils ne représentent pas dans le cas d’espèce une menace à la démocratie. C’est plutôt une opportunité aux leaders du sahel et de l’Afrique de l’ouest de revoir le mécanisme en entier, de le contextualiser afin qu’il puisse répondre aux attentes des populations. Il faut donc organiser un diagnostic régional qui impliquerait aussi bien les Etats membres de la CEDEAO et ceux de l’Alliance des Etats du Sahel, sans oublier les acteurs de la société civile . Sur la base des résultats obtenus on pourrait de permettre de mettre en place une cellule de suivi, d’évaluation et renforcement du processus démocratique. Cette cellule se chargera de veiller à ce que les intérêts des peuples sont respectés, ainsi que la forme et la contextualisation de la démocratie. Il ne faudra pas écarter la possibilité pour certains peuple de choisir autre chose que la démocratie comme mode de gestion de la chose publique. Il faudra avoir le courage de débattre des questions relative à la limitation des mandats et bien d’autres.

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